J’aime beaucoup l’écriture d’Emma Jones, des sortes de rêveries contemplatives, poétiques et artistiques. Elle choisit une photographie et elle l’enrobe de prose poétique. Ses mots s’enfilent, formant ainsi une scène, une façon de voir l’œuvre et de la vivre.

Voici par exemple The Jelly Fish :

I leave him lying on our towel in the dunes, well hidden and protected from the breeze. I can’t curl up there. The towel is too small for the both of us, and the Marram grasses scratch at my ankles and thighs so that I keep swatting at them, thinking that there is some winged creature landing on me. Besides, after so many insomniac nights, even the bright shock of a late spring sun and sky can’t prevent him from drifting away from me. For a while I watch his chest move. The twitch of a leg. Then I get up and pick my way down to the water, the loose sand catching between the sole of my foot and my sandal.
 
Je le laisse étendu sur notre serviette dans les dunes, bien caché et à l’abri de la brise. Je ne peux pas m’y blottir. La serviette est trop petite pour nous deux et les oyats me griffent les chevilles et les cuisses de sorte que je les repousse sans cesse pensant qu’une créature ailée se pose sur moi. Et puis, après tant de nuits d’insomnie, même la beauté éclatante d’un soleil et d’un ciel de printemps finissant ne peut l’empêcher de s’éloigner doucement de moi. Pendant un moment, j’observe sa poitrine qui se soulève. Le sursaut d’une jambe. Puis je me lève et descends vers l’eau, le sable fin s’infiltrant entre la plante de mon pied et ma sandale.

Je vous invite à découvrir l’œuvre d’Emma, les visions, les perspectives qu’elle crée autour de photographies d’artistes. Son travail ne se limitant pas aux photos du monde naturel, il s’inscrit résolument dans notre univers contemporain : elle critique, elle écrit sur les femmes, sur les voyages, sur TikTok et sur Joyce (création de Juno Calypso), femme victime de l’injonction à la beauté artificielle prétendument sans effort.

The chintzy bathroom with its toilet lid plush, the way Joyce is posing – a hand to her face, one leg slightly bent in front of the other, totally femme…
 
La salle de bain kitsch avec son couvercle de toilettes en peluche, la façon dont Joyce pose – une main sur le visage, une jambe légèrement repliée sur l’autre, entièrement femme…

Décidément, les mots comme outils de résistance.

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Valérie Harkness est la fondatrice du site D’Ailleurs poésie. Pédagogue, traductrice, tisseuse de liens multiples entre les cultures, notamment britannique et française, elle a porté sa passion de la langue dans de nombreux recueils parus entre autres aux éditions Rhubarbe, Jacques André, du Petit Véhicule ou Henry.