The Bilingual Literature and Music Event in Leeds – 5th edition. Pour commencer notre revue d’écrivains contemporains britanniques : Oz Hardwick.

Après une pause de plusieurs années, l’événement poésie et langues de Leeds joue des coudes pour percer sa brume silencieuse et fait peau neuve, nous amenant ainsi à reprendre de la voix le 19 septembre prochain. Nous y serons nombreux à aimer la poésie et les échanges interculturels : le programme est à suivre. Watch this space, comme on dit ici !

Commençons cependant par le commencement, et la présentation de poètes anglophones à l’occasion justement de ce « Bilingual Poetry and Music Event » version 2024, car il faut bien rappeler que c’est ici, sous l’impulsion de l’Alliance française de Leeds, que D’Ailleurs poésie fut conçu et que le Bilingual Event vit le jour avec le soutien de nos amis anglophones.

Tout se tient ; il s’agit désormais de tirer les traits et de resserrer les liens.

Recommençons donc par le recommencement.

Je vous présente Oz Hardwick qui réside à York et enseigne à Leeds. Il se dit poète européen, qualificatif éloquent au Royaume-Uni en ces temps douloureux de fragmentation culturelle et politique. On le dit « défenseur du poème en prose néo-surréaliste ».

Pour moi, il est troubadour, philosophe, poète et musicien. Quand il dit ses poèmes, sa voix fait corps avec ses mots. Aux antipodes de la fragmentation et du morcellement, il cherche l’unité harmonieuse des temps d’avant : « The world is tired of keys and combinations. » Au cœur de la désillusion du poète confronté à la vacuité et au mensonge (« headlines rewrite themselves as myths ») se trouvent l’humour, le rythme primordial des mots, de la musique et des corps qui, eux, ne se perdent pas.

Pour cet aperçu du travail d’Oz Harwick, je vous propose un texte extrait du recueil A Census of Preconceptions, publié en 2023 chez SurVision Books, que j’ai traduit plus bas en français.

When we stopped wearing watches, our hands became lighter : a small point, but that’s the nature of evolution – one day you’re a fish, then before you know it, you’re shopping for trousers, considering colour, cut, and the ethical sourcing of material. Or perhaps you’re a lemur, developing digits to suit specific circumstances, whether that’s riddling out grubs from deep beneath tree bark, or forming barre chords to ease your way into a Status Quo tribute act. So, when we stopped wearing watches, it wasn’t just our hands that became lighter, but also our spirits and the pigmentation of our eyes, until we floated above ourselves, timeless, observing the earth and its deep, disordered waters as if through a glass, darkly, our hearts strumming that good ol’ 12-bar blues.

 

Quand nous avons arrêté de porter des montres, nos mains sont devenues plus légères : un petit détail, mais c’est ainsi avec l’évolution – un jour vous êtes en poisson et sans vous en rendre compte, vous vous retrouvez à acheter un pantalon en vous penchant sur sa couleur, sur sa coupe et l’éthique de la provenance du tissu. Ou peut-être que vous êtes un lémurien développant des doigts qui s’adaptent à des circonstances données, que ce soit pour dénicher des larves enfouies profondément sous l’écorce des arbres ou pour former des accords de guitare qui vous aideront à faire partie d’un groupe hommage à Status Quo. Ainsi, quand nous avons arrêté de porter des montres, ce ne sont pas que nos mains qui sont devenues plus légères, mais aussi nos esprits et la pigmentation de nos yeux, jusqu’à ce que nous flottions au-dessus de nous-mêmes, intemporels, observant la terre et ses eaux profondes et confuses comme à travers un verre, obscurément, nos cœurs jouant ce bon vieux blues à 12 mesures.

Je terminerai cette introduction au travail de mon ami et collègue, Oz, au prochain épisode. Cela me permettra de savourer la relecture de certains de ses textes qui, décidément, se découvrent dans le temps.

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Valérie Harkness

Valérie Harkness est la fondatrice du site D’Ailleurs poésie. Pédagogue, traductrice, tisseuse de liens multiples entre les cultures, notamment britannique et française, elle a porté sa passion de la langue dans de nombreux recueils parus entre autres aux éditions Rhubarbe, Jacques André, du Petit Véhicule ou Henry.