quoi nous

comment veux-tu faire la différence entre deux corps
quand ils te crient dessus à tue-tête
et qu’avec leurs bouches ouvertes
ils te dessinent un arrondi sur le visage ?

à la table de l’existence il n’y a que
des gueules qui rivalisent d’éloquence
les autres attendent à la gare le passage du train
du temps de la vie des oies à joues blanches
appelées aussi oies nonnettes
gnak gnak gnak la caravane des oiseaux se déploie
au-dessus de tes cheveux grisonnants en noir
et blanc qui ne sont pas des couleurs
disait la maîtresse en pointant l’index
voulant le faire croire aux enfants
que nous étions

nous ne la croyions pas
parce que nous étions attachés à nos yeux
comme les chiens à leur laisse
nous voulions tout savoir
sauf ce qui pouvait être transformé en beurre

même les vaches nous étaient étrangères
nous n’avons appris d’elles
que la patience et le hochement de tête
comme l’eau nous avons changé d’état
d’agrégation et sommes devenus vapeur d’eau
cubes de glace

un jour nous avons réveillé dans leurs lits
les rivières

daydream

Il fait chaud dans les entrailles du monde
insatiables taupes remuant ses viscères
hors sol sans racines comestibles nous
sommes pour nous-mêmes festins nus
aux lèvres éclaboussées

énergies sans lumière
élégies macabres ensemencées
sans terre fraîche nous errons maintenant
éteints jusqu’au jour qui allume
quand une mine explose sous tes pieds

le ciel presque bleu
se confond en excuses
le miracle des nuages anime quelques
syllabes vierges se posent
délirantes sur la page des heures

l’espace, une prière
où brûlent des cierges de chair