La peste climatique émerge avant son heure, à l’intérieur de notre pupille.
Nous sommes submergés et dispersés dans des abysses uniformes.
Détresse urbaine, retour liquide. La hache des hommes, son feu et sa division. Infection terrestre, rage de cyclone ; rien ne saurait nous préserver. Ayons au moins confiance en la vertu du grand aquarium au moment du déluge.
Citoyens des pays riches, crevons en paix : derniers touchés.
Sans réserve nous exhalons une crasse épaisse qui compose désormais notre atmosphère.
L’abondance est hallucinée. Nous sommes encombrés, ligotés aux extractions, déversements, émissions toxiques en tant que mode opératoire dénaturé.
Envers la nature, envers les autres. En chute libre dans le gras.
Hors du combustible très peu d’épuré, de dégagé. À peine entamé, le produit nous enchaîne au règne de l’emprise.
Encombrés de débris, nous giclons très fort dans les valves de l’avoir.
Culte automatique, croyance en l’accéléré, rien d’autre. Le service rapide comme un chapelet, récité sous hypnose.
La production n’est jamais voulue. Elle s’impose comme un geste compulsif, indésirable, pollution nocturne des industrieux.
L’énergie fossile contamine le vivant à l’air libre, mais nous n’y pouvons rien.
Le pétrole est le sperme de nos transports.
Le fantasme des marchandises universelles s’accouple mal avec celui d’un monde sans frontières.
Nous jouissons des fluides commerciaux, mais la vague migrante qui frappe à nos portes est un repoussoir.
Notre bonté cadrée dans un territoire, une famille. Méfiance comptable, tribale sous le couvert du libre-échange.
Les autres civilisations, tout aussi redoutables que la nôtre. Des royaumes se dressent les uns contre les autres, tellement omniscients qu’ils s’affrontent sur le terrain des nuisances synthétiques et des algorithmes déviés.
L’asymétrie de ces conflits fait parfois penser à certaines relations intimes.
Malaxeurs des mondes à venir nous frémissons pour des conjectures riches en tunnels et aquariums pleurnichards. Les nostalgiques du globe tribu, dernières grappes de noyaux durs de derniers lucides proposent un court sursaut, une pause tropique entre deux broyages.
La canicule confronte l’humaniste, son pur solide à la souplesse des effondrements possibles.
FIN
Martin Payette travaille comme enseignant en francisation avec les immigrants à Montréal. Il a publié dans plusieurs revues de poésie (Estuaire, Exit, Recours au poème, etc.) et a participé à bon nombre de lectures publiques. Il a publié un recueil de poésie, Don Juan et le mode turbo, dans la collection « Plaquettes » de la revue et maison d’édition À l’index.
0 commentaires