marcher à l’aube
bain de forêt
et d’impensé
*
l’hiver a été rude
je regarde par la fenêtre
les camélias sont morts
dans l’eau frémissante
de la théière en verre
s’ouvrent les feuilles de thé
comme des fleurs japonaises
*
la tasse était vide
plus précieuse maintenant
après qu’elle est tombée
avec ces longues rayures
dans la porcelaine
*
elle était silencieuse
maintenant elle gémit
elle vieillit aussi,
la porte
*
vais-je trouver les mots
que tu veux entendre ?
à tout hasard mes lèvres
s’approchent de ton oreille
*
une idée m’est venue
elle s’est envolée
j’entends les oiseaux
se moquer de moi
*
l’émeraude est bien là
le regard traverse
l’anneau de la bague
nulle trace des quarante ans
*
ta main
sur ma joue
caresse
preuve d’existence
*
je marche vent debout
le long de l’étang
des canards nagent en silence
appel d’un train au loin
sur les toits les corbeaux
échangent des informations
*
l’âme ne fait qu’un
avec le corps
et le sait bien
heureusement
elle ne cesse pas
de l’oublier
Christian Garaud est né à Poitiers en 1937. Il est membre du comité de D’Ailleurs poésie. Après avoir enseigné le français en Irlande, en Suède et au Canada, il est devenu professeur à l’université du Massachusetts à Amherst, où il s’est tout particulièrement intéressé à Victor Segalen, Jean Paulhan, Annie Ernaux et au problème du stéréotype. Il réside maintenant à Washington. Depuis 2004, il écrit poèmes, textes et traductions dans une dizaine de revues en France et aux États-Unis. Il a publié en français entre autres aux éditions Décharge/Gros Textes, des Vanneaux, ou La Porte. Aux États-Unis, il fait aussi partie d’un groupe d’une cinquantaine de membres faisant circuler des poèmes inédits en anglais sur la toile tous les quinze jours.
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