Buna
Ici
une enclave
un zoo
des animaux en cage
c’est
nous
au fond
de la tasse
le soleil
caramélise
Colloque de tourterelles abyssiniennes
Les enfants sont dans les rues
à deux ans, sans couches
et sans complexes
ils sont après des brouettes
chargées de légumes
voisin
le grand marché
à ciel ouvert
quand il pleut.
À un angle de rue
l’angle forme trottoir
où des adolescents
accroupis partagent
avec les chiens le reste d’une poubelle
Menu burger frites
à même le sac plastique
il m’a vu le regarder
le regard c’est tout ici.
Le gamin court derrière la voiture
le visage illuminé de khat éventé
il épluchera la tige et
la journée broutera les feuilles
à l’ombre d’une citerne d’OiLibya Petroleum.
Une autre fois,
circulant au petit matin sur l’avenue déserte
la bande d’arrêt d’urgence
séparant les deux voies
des chiens de rue paisibles
dorment auprès d’eux.
Il y a là
deux adolescents
serrés.
Qui sert de couverture
à qui ?
Villes impossibles
il fait trop chaud trop froid
mais une magie vous emporte
à peine avez-vous mis le pied dehors
La simplicité
règne repu, à cuire d’abord
ensuite à déguster
dans son panier l’injera
saucer le soleil
avec les doigts
Ankober
Un camp de tentes
de toile flottant sous la Lune
vibre de la vuvuzela
son tympan de guerre
la première rosée du matin
déportera vers ailleurs
le centre de gravité
des timbales en majesté.
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Peire Joi rentre de trois ans en Éthiopie. Il a pu y exercer sa profession d’art-thérapeute auprès d'enfants autistes d’une fondation éthiopienne et au lycée français. Confiné à Addis Abeba pendant la pandémie, il en a profité pour peindre, dessiner et finalement réaliser pour les enfants un album bilingue français/amharique autour des oiseaux endémiques du pays : ibis, souimanga, merle d’Abyssinie… Celui-ci a été édité à l'occasion de la célébration de la francophonie. De retour en France, Peire Joi a eu besoin de mettre en forme ces impressions éthiopiennes notées au fil des jours. C’est le recueil intitulé Tïzïta (ትዝታ) : mélodie jouée à la flûte par les bergers des hauts plateaux d'Abyssinie, devenue un genre de saudade éthiopienne.
Comme quoi la poésie peut être toute simple, toute nue… ces quelques vers sont pourtant animés d’une puissante force d’humanité qui prend aux tripes comme on vous prendrait par la main. On n’en demande pas plus.